"Un Arbre peut-il grandir avec les Racines d'un Autre ?" - Analyse d'une Objection Panafricaniste
Cet article démonte avec précision l’argument identitaire selon lequel l’Afrique doit rejeter le christianisme pour retrouver sa véritable force spirituelle. En analysant trois piliers – l’exemple de l’Asie, la métaphore de l’arbre et la question de la dépendance spirituelle – il révèle un paradoxe : les grandes civilisations (Chine, Japon, monde arabe) ne se sont pas développées seules, mais en intégrant des idées étrangères. La métaphore de l’arbre est revisitée : le christianisme n’est pas une racine étrangère mais une sève universelle nourrie depuis les origines africaines.
HÉRITAGE BIBLIQUE AFRICAINHISTOIRE ET CHRISTIANISMEANIMISMEKÉMETISME
Vérité Le Noir
8/20/20255 min read


Introduction : Une Voix qui nous Interpelle
Récemment, sur une de nos plateformes, une discussion passionnée a émergé sur le "retour à la spiritualité africaine". Un internaute, avec une passion qui mérite le respect, a écrit un commentaire qui résume parfaitement l'un des arguments les plus puissants des mouvements identitaires. Lisons-le attentivement, car sa voix est celle de beaucoup :
"C'est toujours avec ce même cerveau que tu utilises pour traverser la route ? J'ai peur à ta place ! Vous faîtes juste semblant de ne pas voir la réalité... les arabes, les chinois et japonais etc sont les parfaits exemples de notre lutte... Une chose est sure il n'y a aucun arbre qui grandi avec les racines d'un autre arbre (il n'y a aucun peuple qui se développe avec la culture d'un autre peuple). Mao Zedong avait compris cela et voyez où se trouve la Chine aujourd'hui. Tant que nous serons en majorité spirituellement dépendants des autres, l'Afrique demeurera toujours à genoux..."
Ce commentaire est brillant car il est fondé sur une métaphore puissante : l'arbre et ses racines. Il pose une affirmation qui semble être du pur bon sens : pour qu'un peuple se développe, il doit puiser sa force dans sa propre culture, sa propre spiritualité, ses propres racines. Adopter une "spiritualité étrangère", comme le christianisme, serait donc un suicide culturel qui nous condamne à la dépendance.
Cet argument est-il aussi solide qu'il en a l'air ? Menons l'enquête. Nous allons analyser les trois piliers de ce raisonnement : l'exemple de l'Asie, la métaphore de l'arbre, et la nature même du christianisme.
1. Le Mythe du Développement Autarcique : L'Asie a-t-elle Vraiment Réussi "Seule" ?
Le commentaire cite la Chine, le Japon et les Arabes comme des exemples de peuples qui se sont développés en s'appuyant sur leurs propres cultures. C'est une vision très romantique, mais historiquement fausse.
Le Cas du Japon : Après des siècles d'isolement, le développement spectaculaire du Japon à l'ère Meiji (à partir de 1868) n'a été possible que par une politique d'imitation et d'adaptation massive de la technologie, de la science, des structures politiques et des systèmes juridiques... de l'Occident. Les Japonais ont envoyé des milliers d'étudiants en Europe et en Amérique pour copier les modèles occidentaux et les adapter à leur culture. Ils ont compris qu'on ne réinvente pas la machine à vapeur ou la constitution.
Le Cas de la Chine : L'auteur cite Mao Zedong. Mais quelle était l'idéologie de Mao ? Le Marxisme-Léninisme. C'est une philosophie née en Allemagne (Marx) et mise en pratique en Russie (Lénine). C'est l'une des doctrines les plus "importées" et les plus violemment anti-traditionnelles qu'on puisse imaginer. Mao n'a pas développé la Chine en revenant à Confucius ; il a tenté de détruire la culture ancestrale chinoise au nom d'une idéologie européenne. Le développement économique actuel de la Chine, quant à lui, est basé sur une adoption pragmatique du capitalisme de marché, une autre "invention" occidentale.
Le Cas du Monde Arabe : L'âge d'or de la civilisation arabo-musulmane (VIIIe-XIIIe siècles) n'a pas été un développement en vase clos. Il a été le fruit d'une synthèse extraordinaire entre la religion islamique, la philosophie grecque (Aristote, Platon), les mathématiques indiennes (les chiffres que nous appelons "arabes" sont en réalité indo-arabes) et la médecine persane.
Conclusion : L'histoire nous montre que les grandes civilisations ne grandissent jamais "seules". Elles grandissent par la synthèse, par leur capacité à emprunter, à adapter et à intégrer les meilleures idées, d'où qu'elles viennent. L'idée d'un développement pur, basé uniquement sur ses propres racines, est un mythe.
2. La Métaphore de l'Arbre et des Racines : Et si les Racines étaient plus Profondes ?
La métaphore de notre ami est puissante : "Aucun arbre ne grandit avec les racines d'un autre". C'est vrai. Mais cette métaphore repose sur un postulat caché, et c'est là que se trouve l'erreur.
Elle postule que le christianisme est un "autre arbre", un arbre étranger planté à côté de l'arbre africain.
Mais tout le propos de notre enquête est de prouver le contraire.
Des Racines Scientifiques Communes : Comme nous l'avons vu, la science (la génétique) nous prouve que nous ne sommes pas des arbres séparés. Nous sommes tous des branches du même et unique arbre de l'humanité, un arbre dont les racines plongent profondément dans le sol africain.
Des Racines Théologiques Communes : Notre modèle montre que le christianisme n'est pas une "religion étrangère". Il est l'accomplissement d'une histoire qui a commencé en Afrique avec la création de l'homme à l'image de Dieu, et avec l'envoi en mission d'une lignée africaine (L3).
La véritable métaphore n'est donc pas celle de deux arbres concurrents. C'est celle d'un arbre unique dont certaines branches ont oublié qu'elles partagent les mêmes racines. Le christianisme n'est pas un "arbre étranger". C'est un sève qui remonte depuis les racines les plus profondes de notre histoire africaine commune pour venir nourrir toutes les branches. Rejeter le Christ au nom de l'"authenticité africaine" est aussi illogique que pour une branche de se couper du tronc en prétendant être plus "authentique" toute seule.
3. Le Paradoxe de la Dépendance Spirituelle
Le commentaire se termine par une affirmation forte : "Tant que nous serons spirituellement dépendants des autres, l'Afrique demeurera à genoux". C'est une affirmation juste dans son intention, mais tragiquement ironique dans son application.
Car qu'est-ce que les spiritualités traditionnelles nous proposent ? Elles nous placent dans une dépendance spirituelle constante envers une multitude d'entités : les esprits de la nature, les divinités claniques, et surtout, les ancêtres. C'est un système qui nous maintient dans un état de servitude, de peur et de négociation.
Le message de l'Évangile est la déclaration de libération la plus radicale qui soit. Il nous dit que, par le Christ, nous ne sommes plus dépendants de médiateurs faillibles. Nous avons un accès direct au Créateur de l'univers, que nous pouvons appeler "Père". Il ne nous demande pas d'être "spirituellement dépendants" de prêtres, de gourous ou même d'apôtres. Il nous invite à une relation personnelle et directe.
Conclusion : La Vraie Dépendance
La question n'est donc pas "Faut-il être dépendant ou indépendant ?". La question est "De qui ou de quoi choisissons-nous de dépendre ?"
Le retour aux spiritualités ancestrales prôné par certains courants nous propose de nous libérer d'une prétendue "dépendance" au Christ pour nous replonger dans une dépendance réelle aux esprits capricieux et aux traditions qui ont montré leurs limites morales.
L'Évangile, lui, nous propose de nous libérer de la servitude de la peur pour entrer dans la glorieuse liberté des enfants de Dieu.
La Chine a emprunté le communisme à l'Europe. Le Japon a emprunté la technologie à l'Occident. Le monde arabe a emprunté la philosophie à la Grèce. Ils ont tous emprunté des systèmes humains, faillibles. Nous, Africains, avons l'opportunité d'emprunter quelque chose de bien plus grand. Ou plutôt, de nous regreffer sur notre propre racine, sur la vérité universelle qui a été révélée au monde à travers une lignée qui a commencé ici même. La vraie indépendance n'est pas de rejeter la vérité parce qu'elle a été portée par des messagers imparfaits. La vraie indépendance, c'est de s'emparer de la Vérité elle-même, d'où qu'elle vienne, car elle seule rend libre.
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