Panafricanisme et Suprématie Blanche : Une Analyse

Introduction : L'Egrégore de la Contradiction

Pour comprendre la dynamique spirituelle de notre époque, certains penseurs afrocentristes utilisent un concept puissant : celui de l'égrégore. Analysons ce concept avec le plus grand sérieux. Un égrégore, nous dit-on, est une 'forme-pensée' collective, une entité énergétique créée et nourrie par les pensées, les émotions et les rituels d'un groupe de personnes. Plus un groupe focalise son énergie sur une idée, plus l'égrégore associé à cette idée devient puissant et autonome.

Acceptons ce cadre de pensée pour un instant, même si nous n'y adhérons pas (nous avons expliqué ici pourquoi) . Et posons une question simple : si cette logique est vraie, quel est l'égrégore le plus puissant que le discours panafricaniste réactionnaire est en train de nourrir aujourd'hui ?

Partie 1 : l'Égrégore de la "Suprématie Blanche"

Selon la logique des égrégores, l'égrégore de la 'suprématie blanche' n'est pas une simple idée. C'est une entité énergétique qui a été créée et nourrie pendant des siècles.

• Sa Nourriture : Il se nourrit de chaque pensée, de chaque acte, de chaque parole qui affirme la centralité, la puissance et la supériorité de l'homme blanc.

• Son But : Son objectif est de maintenir l'homme blanc au centre de l'histoire, comme l'acteur principal, le responsable de tout, que ce soit en bien ou en mal.

Pour cet égrégore, le pire n'est pas d'être détesté. Le pire est d'être ignoré. Tant qu'il reste le sujet principal de la conversation, il continue de se nourrir et de grandir.

Partie 2 : Le Renforcement de l'Egrégore

Examinons maintenant la rhétorique de certains mouvements afrocentristes à la lumière de cette définition.

1. "Toute la responsabilité de l'esclavage incombe au Blanc."

   
   > L'Intention : Dénoncer une injustice.
   > L'Effet Égrégorien : En disant cela, vous retirez toute agence et toute responsabilité historique aux acteurs africains (rois, marchands...). Vous les réduisez au statut de victimes passives et infantilisées. Vous affirmez, en creux, que seul l'homme blanc était assez puissant et intelligent pour orchestrer une telle entreprise. Vous êtes en train de nourrir l'égrégore de la puissance blanche.

2. "Le Christianisme est la religion de l'homme blanc."

   
   > L'Intention : Rejeter une aliénation culturelle.
   > L'Effet Égrégorien : Vous offrez sur un plateau d'argent la plus grande religion du monde à l'homme blanc. Vous effacez 2000 ans d'histoire et de théologie africaines (des Pères de l'Église à l'Église éthiopienne). Vous confirmez l'idée que les concepts spirituels les plus puissants sont une création blanche. Vous nourrissez l'égrégore de la supériorité intellectuelle et spirituelle blanche.

3. "Nous devons rejeter tout ce qui vient de l'Occident."

   
   > L'Intention : Affirmer une fierté culturelle.
   > L'Effet Égrégorien : Toute votre pensée devient une réaction à l'homme blanc. Il reste le point de référence central, celui par rapport à qui vous vous définissez, même en opposition. Vous ne créez pas une narration nouvelle et autonome ; vous êtes piégé dans une danse dialectique avec lui. Chaque attaque que vous portez est une reconnaissance de sa centralité. Vous nourrissez l'égrégore de la centralité blanche.
   

Conclusion de la Partie 2 : Le Paradoxe Dévastateur

Le paradoxe est donc total. En focalisant toute son énergie, toute sa colère, toute sa pensée sur 'l'homme blanc' comme cause unique de tous les maux et comme propriétaire de la religion la plus influente, le panafricanisme réactionnaire est devenu, selon sa propre logique, le plus grand serviteur de l'égrégore de la suprématie blanche. Il le nourrit chaque jour, à chaque publication, à chaque accusation. Il le maintient en vie en le gardant au centre de toutes les attentions.

Partie 3 : La Véritable Libération – Affamer l'Égrégore

Alors, comment véritablement détruire cet égrégore ? Non pas en le combattant de front, ce qui le nourrit, mais en l'affamant par l'indifférence et en construisant notre propre centre.

C'est précisément ce que propose notre modèle concordiste :

1. Il Décentralise l'Homme Blanc : Il montre que l'histoire du salut commence en Afrique. Que la lignée de l'alliance est africaine à son origine. Que la théologie la plus profonde de l'Église primitive était africaine. L'homme blanc n'est plus la source, il n'est qu'une branche tardive de l'arbre.

2. Il Restitue l'Agence aux Africains : Il reconnaît la complexité de l'histoire, y compris la responsabilité des acteurs africains dans la traite, non pas pour les accabler, mais pour leur rendre leur statut d'acteurs de l'histoire, et non de simples objets.

3. Il Crée une Narration Autonome : Il ne se définit pas contre l'Europe, mais pour une vérité plus grande et plus ancienne. Il propose une fierté basée sur des faits (scientifiques, historiques) et sur une vocation divine universelle.
   

La conclusion est simple : La véritable décolonisation de l'esprit n'est pas de crier contre l'ancien maître. C'est de construire sa propre maison si solidement et si magnifiquement qu'il en devient un voisin insignifiant. C'est affamer l'égrégore de la suprématie blanche en cessant de le regarder, et en tournant nos yeux vers la vérité de notre propre héritage, un héritage qui commence non pas à Bruxelles ou à Lisbonne, mais en Éden en Orient et au cœur de l'Afrique.