La Transfiguration – Consultation des Ancêtres ou Couronnement du Fils ?

La scène biblique de la Transfiguration (Matthieu 17, Marc 9, Luc 9) est parfois présentée, à tort, comme une séance de culte des ancêtres où Jésus consulterait Moïse et Élie. Une lecture attentive du texte révèle au contraire un événement christologique majeur affirmant la supériorité de Jésus. Les Évangiles ne parlent pas d’“invocation” mais d’“apparition”, indiquant une initiative divine.

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Vérité Le Noir

8/12/20256 min read

Introduction : Le Mythe du "Jésus Animiste"

Dans le but de présenter le christianisme comme une dérivation des spiritualités africaines, certains penseurs kémites et traditionalistes avancent une interprétation audacieuse de la Transfiguration (Matthieu 17, Marc 9, Luc 9). Selon eux, cette scène mystérieuse ne serait rien de moins qu'une séance de culte des ancêtres, où Jésus "invoque" les esprits de deux de ses plus grands prédécesseurs, Moïse et Élie, pour recevoir leur sagesse et leur approbation.

Cette lecture, bien que créative, est une distorsion complète et un contresens total du texte et de la théologie bibliques. Une analyse rigoureuse de la scène, de ses acteurs et de son but révèle que la Transfiguration n'est pas une validation du culte des ancêtres, mais sa réfutation la plus éclatante, un événement qui établit la supériorité unique et finale de Jésus sur tous les médiateurs qui l'ont précédé.

1. L'Analyse du Verbe : Apparaître n'est pas Invoquer

Le premier point qui invalide leur thèse est le vocabulaire même utilisé par les Évangiles.

  • Le Fait Textuel : Aucun des trois récits synoptiques n'utilise un verbe qui signifierait "invoquer", "appeler" ou "faire venir". Le texte grec utilise des termes comme horao ("ils virent") et phainomai ("apparaître"). Luc 9:30-31 est le plus clair : "Et voici, deux hommes s'entretenaient avec lui : c'étaient Moïse et Élie, qui, apparus dans la gloire, parlaient de son départ (exodos) qu'il allait accomplir à Jérusalem."

  • L'Exégèse :

    • L'Initiative est Divine, pas Humaine : Jésus ne pratique pas un rituel pour faire venir les esprits des morts. Moïse et Élie apparaissent de leur propre chef, ou plutôt, par une initiative divine. C'est un événement surnaturel orchestré par Dieu, pas une séance de spiritisme initiée par Jésus.

    • Inversion des Rôles : Dans le culte des ancêtres, le vivant invoque le mort pour obtenir de l'aide. Ici, ce sont les "morts" qui viennent au service du Vivant. Ils viennent parler de SA mission, de SON "exode" à Jérusalem (sa mort et sa résurrection). Ils ne sont pas là pour le guider, mais pour confirmer sa destinée.

2. L'Analyse du Statut des Visiteurs : Des Vivants, pas des Morts

La deuxième faille de l'interprétation animiste est qu'elle applique incorrectement ses propres règles, en considérant Moïse et Élie à la fois comme de simples "ancêtres morts" et comme des ancêtres directs de Jésus. La tradition biblique contredit ces deux points.

a. Des Figures Uniques, pas de Simples "Morts"

La Bible accorde à Moïse et Élie un statut exceptionnel qui les distingue du commun des mortels dans l'au-delà.

  • Élie : Le texte de 2 Rois 2:11 est formel. Élie n'est pas mort. Il a été "enlevé au ciel" dans un char de feu. Dans la théologie juive et chrétienne, il est considéré comme vivant dans la présence de Dieu. Il ne peut donc pas être "invoqué" comme l'esprit d'un mort errant.

  • Moïse : Bien qu'il soit mort (Deutéronome 34:5), son statut est unique. Le texte précise que "personne n'a connu son sépulcre", et l'épître de Jude (verset 9) mentionne un conflit mystérieux entre l'archange Michel et Satan au sujet du "corps de Moïse". Cette tradition suggère une attention divine particulière, peut-être en vue d'une résurrection spéciale. Le fait qu'il apparaisse "dans la gloire" indique qu'il n'est pas un simple fantôme, mais un être glorifié.

Jésus ne s'entretient donc pas avec des "esprits des morts" au sens animiste, mais avec deux figures exceptionnelles de l'histoire du salut qui ont une relation unique avec la vie éternelle.

b. Une Question de Lignée : Le Non-Sens dans leur Propre Vision du Monde

C'est ici que l'argument s'effondre selon les propres critères du culte ancestral.

  • Le Principe du Culte Ancestral : Un tel culte est, par définition, basé sur la lignée de sang directe. On honore son père, son grand-père, les fondateurs de son clan, de sa lignée.

  • La Réalité Généalogique de Jésus : Les deux généalogies de Jésus dans la Bible (Matthieu 1 et Luc 3) sont très claires sur un point : elles tracent sa lignée à travers la tribu de Juda et la maison royale de David.

  • La Lignée de Moïse et Élie : Si nous examinons la Bible, nous constatons un fait simple :

    • Moïse était de la tribu de Lévi, la tribu sacerdotale.

    • L'ascendance d'Élie n'est pas précisément détaillée, mais il n'appartient en aucun cas à la lignée de David. L'idée qu'Élie serait un ancêtre de Jésus est une impossibilité historique et biblique.

      1. Géographiquement, la Bible le situe à Galaad, un territoire à l'est du Jourdain qui n'a jamais appartenu à la tribu de Juda, d'où est issue la lignée de David.

      2. Généalogiquement, son nom est totalement absent de toutes les listes méticuleuses de la descendance royale de David que la Bible nous a conservées.

      3. Politiquement, son ministère était centré sur le Royaume du Nord, en confrontation avec les rois locaux, et non sur le Royaume de Juda où régnait la dynastie de David.

      Par conséquent, lorsque Jésus s'entretient avec Élie à la Transfiguration, il ne s'adresse pas à un ancêtre de sa lignée de sang, mais à une figure prophétique majeure d'une autre branche d'Israël.

  • La Conclusion Logique : Si l'on applique la logique stricte de la lignée de sang, qui est le fondement même du culte des ancêtres, Moïse et Élie ne sont pas les ancêtres directs de Jésus. Ils sont, au mieux, des "cousins" très éloignés d'autres tribus.

Par conséquent, l'affirmation que Jésus pratiquait un "culte des ancêtres" est un non-sens, même dans la propre vision du monde animiste. Il n'était pas en train de s'adresser à sa lignée. Il s'entretenait avec des figures prophétiques d'autres branches de la grande famille d'Israël. L'événement est donc d'une nature radicalement différente.

3. L'Analyse du But de la Scène : Le Couronnement du Fils, pas la Consultation des Ancêtres

C'est l'argument le plus dévastateur. Le but de la scène n'est pas que Jésus reçoive quelque chose de Moïse et Élie, mais que les disciples reçoivent une révélation sur Jésus.

  • Le Rôle de Moïse et Élie : Témoins, pas Conseillers.

    • Pourquoi ces deux-là ? Parce qu'ils représentent les deux piliers de l'Ancien Testament : Moïse représente la Loi, et Élie représente les Prophètes.

    • Leur présence aux côtés de Jésus signifie que toute la révélation de l'Ancien Testament (la Loi et les Prophètes) rend témoignage à Jésus et trouve son accomplissement en lui. Ils ne sont pas ses "ancêtres" au sens animiste, ils sont ses "témoins" au sens juridique et prophétique.

  • La Réaction de Pierre et la Correction Divine.

    • Pierre, voyant les trois figures, a une réaction typiquement "religieuse" : "dressons trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie". Il met les trois sur un pied d'égalité.

    • La réponse de Dieu est immédiate et foudroyante. Une nuée les couvre, et une voix du ciel (celle du Père) déclare : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé... ÉCOUTEZ-LE !" (Matthieu 17:5).

  • Le Message Final : L'instruction du Père n'est pas "Écoutez-les tous les trois". C'est "ÉCOUTEZ-LE [LUI SEUL] !". C'est un commandement divin qui établit la supériorité absolue et finale de la révélation en Jésus sur celle de la Loi (Moïse) et des Prophètes (Élie). La scène se termine avec les disciples qui ne voient plus que "Jésus seul".

Conclusion Finale : Une Scène Anti-Animiste par Excellence

La Transfiguration, loin de valider le culte des ancêtres, en est la négation la plus radicale.

  • Elle ne montre pas un homme qui invoque des médiateurs, mais le Fils de Dieu que les anciens médiateurs viennent honorer.

  • Elle ne se termine pas par un message des ancêtres, mais par un commandement du Père de cesser d'écouter les anciens médiateurs pour n'écouter que le Médiateur final et unique.

Toute tentative de lire cette scène comme une séance de spiritisme est un contresens qui ignore le texte, le contexte, et le point culminant de la révélation : l'établissement de la supériorité absolue de la personne de Jésus-Christ.